Le dénombrement des familles Juives de 1751 conservé dans le service des archives départementales de la Gironde  comporte le nom, prénom, âge, profession, prénoms et âge des enfants majeurs ou mineurs, lieu d’habitation ainsi que l’année d’établissement à Bordeaux.
On compte 1586 hommes, femmes, enfants qui composent 327 familles ayant 147 servantes catholiques et un homme de couleur, domestique âgé de 17 ans.
 
Ils sont tous de La Nation Portugaise et déclarent s’être établis à Bordeaux entre 1700 et 1730, venus d’Espagne ou Portugal, avec parfois une halte de quelques années à Saint Esprit lès Bayonne, Bidache, La Bastide Clairence et Peyrehorade où ils étaient sous la protection des ducs de Gramont, souverains de Bidache.
Les Juifs de la Nation Avignonaise, moins nombreux ont obtenu leurs lettres patentes en 1759
.
Ceux de la Nation Portuguaise sont marchands de drap, de toile, négociants, armateurs, banquiers, changeurs., un seul maître orfèvre , un marchand  de liqueurs, un confiturier, un marchand de café etc ..
Huit faiseurs de chaucolat et quatorze marchands de chaucolat (sic) feront découvrir aux Bordelais ce nouveau breuvage considéré souvent  à cette époque là comme un remède.
Ces artisans ou ouvriers, sans que l’on puisse faire la distinction, habitent rue Tombeloly, rue du Cayre et rue Mingin, un seul (David Torres) habite depuis six ans rue Ste Eulalie.
 
LES FAISEURS DE CHOCOLAT
David MENDES NOBLE 42 ans établi à Bordeaux vers 1739
Isaac NUNES né à Bordeaux en 1709 époux de Sara Dias
Isaac LEAL 30 ans époux Esther Dacuna, famille établie en 1709
Jacob TORRES 36 ans, rue Tombeloly époux de Rebeca Louis
Isaac TORRES MONTAIGNES 61 ans et son fils Jacob 26 ans
Aaron COUTEIGNE 49 ans époux de Sara Carvailho 43 ans
Isaac LOPEZ SILVA 27 ans époux de Rachel Depas, rue du Cayre depuis 25 ans
Abraham LOPES 50 ans époux de Esther Navarre 45 ans et un fils Joseph, 4 mois
 
LES MARCHANDS DE CHOCOLAT
LOPES David 43 ans époux de Rebecca Rodrigues 43 ans établi en 1712
MENDES QUIROS Aaron 35 ans et sa mère Rebecca Mendes Nunes 64 ans, depuis 1721
GARCIES Isaac 65 ans époux de Sarra Campos, à Bordeaux depuis 26 ans
LOPES Moïse 34 ans né à Bordeaux époux de Judith SARA
DIAS DEPAS Moïse 61 ans et Esther Dias 47 ans, à Bordeaux depuis 19 ans
LOUIS Daniel 44 ans et Abigail Rodrigues 39 ans
LOPES PERREYRA Isaac 49 ans établi depuis 34 ans
RODRIGUES Abraham 34 ans né à Bordeaux époux de Judith Lopes Navarro
TORRES David 43 ans et son épouse Rachel, arrivé depuis 6 ans
GOMES SILVA Isaac 36 ans et Sara Dacosta 30 ans
RODRIGUES Antoine 77 ans époux de Rebecca Laguna 77 ans, famille établie depuis 1700
ROQUES Etsher veuve 46 ans  habitant depuis 32 ans rue Tombeloly
TORRES Abraham 46 ans né à Bordeaux, époux de Abigail Moline, rue Tombeloly
 
Parmi ces familles de marchands de chocolat, une seule se distingue par la création d’une petite fabrique : les « Rophé ». Rachel Rophé est établie rue Bouhaut depuis 1711 avec ses trois fils Daniel 30 ans, Samuel 27 ans et Abraham 22 ans.
 
Joseph Rophé (°ca 1760) époux d’Abigaïl Dacosta est le fondateur de la fabrique :
« Chocolat Rophé 32 rue Fossés de l’Hôtel de Ville à Bordeaux »
Son fils Daniel né à Bordeaux  le 18/01/1800, lui succède, et épouse en 1821 Esther Philip.
Ils sont régulièrement cités dans les almanachs du Commerce et font de la publicité dans le journal La Gironde de 1855. Elle cessera son activité vers 1860.
Au décès en 1809 de David Rophé (frère cadet de Joseph), sa veuve Sara Moreyra épouse  en 1815 Abraham Mendès France. Cette alliance nous mène aux ancêtres également chocolatiers, de Pierre Mendès France (1902-1982) député depuis 1946, président du conseil des ministres en 1954-55.
 

Isaac MENDES FRANCE (frère d’Abraham) 1785-1859  est chocolatier 8 rue Mingin.
à Bordeaux où il a épousé en 1815 Esther Fonsèque. Son fils David (1821-1887) est également chocolatier marié en 1848 à Abigaïl Barabraham.
David est le bis aïeul de Pierre Mendès France
Fuyant les persécutions au Portugal, la famille Mendès de França arriva au XVIIè siècle à Labastide Clairence, Bayonne puis Bordeaux. (Valynseele & Grando « A la découverte de leurs racines, Pierre Mendès France »  page 133)
 

De tous ces petits artisans subsiste au début du XIX è siècle «  la Maison Rophé, 32 rue Fossés de l’Hôtel de Ville » citée dans les almanachs du commerce de 1837, 1839, 1842, 1850, toujours à la même adresse, fondée par Joseph Rophé né vers 1760 et Abigaïl Dacosta.
Son fils Daniel né à Bordeaux le 18/01/1800 lui succède.
Les Rophé sont alliés à la famille Mendès France. Sara Moreyra veuve de David Rophé, frère cadet de Joseph) épouse en 1815 Abraham Mendès France.
 
Les derniers chocolatiers Juifs de Bordeaux
selon le recensement de 1831
 
ASTRUC Salomon né en 1776 à Bordeaux
ASTRUC Jacob né en 1798 à Bordeaux
CARDOZE David natif de Bayonne
DACOSTA Abraham né le 14/08/1761 à Bordeaux
DACOSTA Moïse né vers 1764 à Bayonne
LOPES Abraham né en 1789, établi en 1826
NAXARA Jacob dit David né le 18/3/1781 à Bordeaux
PHILIP Daniel né en 1796 à Bordeaux époux Molina
SALZEDO Aaron né en 1776 à Bordeaux
SAMSON Moïse né en 1779   à Bordeaux
Les CHOCOLATIERS JUIFS  de BORDEAUX
au  XVIII°Siècle
Qu’ils viennent d’Espagne ou du Portugal, ils sont toujours désignés dans les minutes notariales ou les registres de l’ancien régime de Bayonne, Bidache, et Peyrehorade comme étant ceux « de la Nation Portugaise ».
Le 5 juin 1654, la communauté achète par acte passé chez Me Reboul notaire, le campot de Saint Simon sur les hauteurs de St Esprit pour inhumer leurs premiers morts. Le 13 octobre 1689, Pierre Duvignau procureur du Roi habitant Hastingues vend sa métairie de Matras à Bayonne , sur les hauteurs du quartier Saint Etienne, où seront transférés les restes de ceux du Campot St Simon.
Le cimetière Israélite de Bayonne est situé , en face à l'Eglise St Etienne
 
ANDRADE Abraham, né vers 1690 en Espagne, habitant Saint Esprit, il loua en 1725 une chambre à Bayonne pour y faire du chocolat, et ce, malgré les ordonnances des Echevins interdisant aux Juifs de résider dans la ville et d’y louer des boutiques ou des chais.
 
CAVA Isaac né vers 1734, décédé en 18O9 au bourg de Saint Esprit
 
CASTRO Abraham né vers 1736, décédé en 1810.sans alliance.
Témoin en 1797 au mariage de son confrère chocolatier Marchodée Levy
 
GOMEZ CASSERES David né en 1804, époux en 1825 Rachel Lopez
 
LEON Abraham né le 3/2/1814 à Bordeaux époux en 1838 à Saint Esprit Léa Pereyre
 
LEON Salomon né à Bordeaux en 1776 fils d’un imprimeur libraire, interprète de langue espagnole et Hébraïque.
Epouse en 1806 à Saint Esprit Meriam Dacosta et en 1808 Judith Dacosta.
 
LEVY Marchodée « travailleur au chocolat » né vers 1772 fils de Joseph Levy aussi chocolatier
Marié en 1797 à Rachel Dacosta dotée de 200 francs.Son confrère Abraham Castro est son témoin.
 
LOPEZ Isaac né le 28 avril 1769 à Saint Esprit, marié en 1802 à Delfina Dessa, née en 1771 à Lisbonne fille de David Dessa Pereyra et de Rachel Furtado. Décédé le 2 septembre 1855.
 
LOPEZ DIAS Moïse époux de Esther Delvaille. Leur fils Salomon s’embarque en 1771 à destination de Saint Domingue pour rejoindre son cousin Jacob Delvaille.
 
NAVARRE Salomon né le 26 avril 1807 à Montpellier où son père Samuel Navarre était chocolatier.
Il épouse en 1833 dans le bourg de Saint Esprit Rebeca Nérida Gomes.
 
NUNEZ Isaac né à Bordeaux le 31 janvier 1781, marié à Saint Esprit en 1802 à Abigail Halif.
Il a pour témoin son confrère Joseph Levy 53 ans.
 
OLIVIER Abraham surnommé SAROUNE, fils de Josué Olivier chocolatier à Bordeaux. Il épouse en 1828 à Saint Esprit Sara Pereyre et  en 1838 Rachel Dacosta. En 1857, il est dit chocolatier lors du mariage de sa fille Sara avec le bijoutier Bordelais Moïse Naxara. Lors de son décès dix ans plus tard, il est le dernier chocolatier juif du Bourg de Saint Esprit.
 
PEREYRE David chocolatier de Saint Esprit, condamné en 1784 au carcan, flétrissement et cinq ans de galère pour crime de vol. Sentence confirmée par le parlement de Bordeaux le 15 janvier 1784.
 
PEREYRE Moïse né le 6 octobre 1796 fils de Jacob Pereyre habitant Bordeaux. Il épouse en 1819 à Saint Esprit Rachel Suarez.
 
PIGNERO Alvarez négociant. En 1766 Moysé Mesquitte, syndic des chocolatiers de la Nation Portugaise de Saint Esprit donne pouvoir à Pignero pour se transporter à Bordeaux et poursuivre le procès contre la corporation chocolatiers Bayonnais.
 
POLONAIS Siméon dit BARSALOMON, né en 1789 à Pau, marié à Saint Esprit en 1824 Léa fille de Isaac Gomez Silva et de Bigaïl Dacosta Franco. Il est chocolatier rue Maubec en 1852 lors du mariage de sa fille Rachel avec Abraham Cerf-Lion.
 
RODRIGUEZ CASADE Isaac né vers 1763 au Portugal. Marié à Saint Esprit en 1795 à Rique Dacosta native de Bidache.
 
RODRIGUEZ LOPES Mathieu, né dans la ville de Léon en Castille. Après son abjuration il épouse en 1735 dans la collégiale de Saint Esprit
 
Laurence de Lalande Hayet fille d’un ajusteur en l’Hôtel des Monnaies et de Marie Detcheverry habitant Port Leyron à Saint Etienne.
Parmi ceux qualifiés de négociants vers 1770, on cite
des experts dans le genre de toute sorte de cacao :
Aaron RODRIGUEZ, Jacob DANIEL GOMEZ, David PEREYRA, Samuel REGIDOR, David DEPAS, David SILVERA
Lors d’un  litige sur une livraison débarquée dans le port de Bayonne, ils sont chargés d’examiner, briser et sentir une quantité de grains
Le notaire royal est chargé de rédiger un acte constatant l’état des sacs de cacao à leur arrivée et de procéder à la vente aux enchères.
 
Au début de l’année 1770, ils sont appelés pour donner leur avis sur deux cargaisons de « Caraque » en provenance d’Amsterdam importées par Abraham NUNEZ ,fils du négociant Samuel NUNEZ  (ils feront faillite à Bordeaux en 1809)
« Seize balles contiennent un cacao vert ayant une forte odeur forte tirant à l’aigre, ce qui provient que le dit cacao a été cueilli avant sa parfaite maturité ». « Sur 39 balles, il s’est trouvé après vérification 20 balles de Caraque extrêmement avariés » Les avaries surviennent fréquemment au cours de la traversée.
 
Le Bourg de Saint Esprit vers 1810
Dans son ouvrage « La Communauté Juive de Bayonne au XIXe siècle » Anne Bénard-Oukhemanou a dénombré en 1807 cinq chocolatiers :
Isaac Lopez, Jacob Torrès, Abraham Castro, Isaac Desaa, Daniel Gommès-Cassères.
Selon l’auteur, Abraham OLIVIER surnommé Saroune  fut le dernier chocolatier Juif de Saint Esprit lors de son décès en 1867. Il était né le 28/07/1797 à Saint Esprit fils de Josué Olivier chocolatier à Bordeaux et de Sara LEON.
Les Chocolatiers Juifs Portugais
du bourg de Saint Esprit les Bayonne
1659 -
David Chaillou obtient ses lettres patentes pour exploiter le chocolat
1660 -
Mention du chocolat à Ciboure
1761 Bayonne -
Les fondateurs de la corporation des chocolatiers
19 septembre 1761 -
Statuts et règlements présentés pour la communauté
des marchands chocolatiers
Arrivée du chocolat
à Bayonne
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Dès 1659, David Chaillou (ou Challiou) obtint de Sa Majesté lors de son passage à Toulouse, des lettres patentes lui accordant le droit de débiter et vendre dans toutes les villes du royaume, le chocolat en liqueur, pastilles pour une durée de vingt neuf ans.
 
Le Parlement de Paris, tardant à l’enregistrement de ses lettres, David Chaillou impatient d’exploiter ce chocolat en lequel il croit fortement suit la cour à Saint Jean de Luz. Il sollicite alors, la recommandation d’Olympe Mancini, nièce de Mazarin, ancienne maîtresse du Roi, épouse de Mr de Carignan comte de Soissons qui accompagne la Cour.
 
La comtesse curieuse de nouveautés, découvre ce breuvage subtil qui dit-on «  est propre à réveiller les ardeurs de Vénus » grâce à son chef d’office le célèbre cuisinier Nicolas Audiger.
Ce dernier n’est pas moins fier de faire savoir qu’il a appris en Italie « l’art de préparer le chocolat ».
Le cardinal Mazarin et le maréchal de Gramont font venir d’Italie « deux habiles cuisiniers », les sieurs Andrea Salvador et Moré « pour préparer le chocolat, le thé et le café que peu de gens connaissent encore en France ».
Selon Audiger, Mr de Gramont était fort curieux de ces choses et ne regardait pas à la dépense.
Le lendemain du mariage de Louis XIV et de Marie Thérèse d’Espagne, célébré le 9 juin 1660 en l’église de Saint Jean de Luz, Sa Majesté prie la nouvelle reine de se séparer de sa camera mayor, car une telle charge ne peut être tenue par une étrangère. Il l’autorise à ne garder auprès d’elle que son médecin, son maître chirurgien, son confesseur et sa première femme de chambre surnommée
La Molina, en raison de son habileté à manier le mousseur, chargée de lui préparer son chocolat
à la cannelle qu’elle buvait en cachette, Sa Majesté préférant le café.
 
Quant à Olympe Mancini, elle parvient à se faire nommer surintendante de la maison de la Reine.
Le 15 juin commence la marche triomphale du roi et Marie Thérèse vers Bayonne et Bordeaux.
David Chaillou, protégé de la comtesse de Soissons, suit la cour à Paris, installe sa boutique prés la Croix du Trahoir, rue de l’Arbre Sec, derrière le Louvre. Le quartier est connu pour ses nombreuses échoppes où se vendent des produits raffinés, des herbes de Provence, de bien juteuses oranges et mandarines, des citrons et toutes les autres gourmandises pour le palais des gens fortunés. Le comte de Soissons qui était natif de la Savoie, fit venir d’Italie des petits pois, qu’il écossa lui-même et fit préparer par le cuisinier de Sa Majesté.
Louis XIV fut tellement ravi par la découverte de ce nouveau mets, qu’il en reprit deux fois et ordonna d’en porter un grand plat à la Reine Mère.
Quatre jours avant la célébration du mariage de Louis XIV, le Secrétaire d’état Mr de Loménie comte de Brienne adresse de Ciboure, au garde des sceaux, le chancelier Séguier, sur les instances de monsieur de Carignan comte de Soissons, présent à Saint Jean de Luz avec son épouse Olympe Mancini, la lettre suivante:
 
Monseigneur,
Ces lignes pour accompagner la lettre que le ROY vous escrit en faveur du sieur CHALLIOU qui est une personne que Monsieur le comte de Soissons protège. Et comme c’est en sa considération que Sa Majesté luy a accordé la permission de faire et vendre privativement à toute âme de son royaume la composition dite chocolat, il espère aussi que cette mesme raison vous aurez agréable de luy sceller ses lettres. En mon particulier, Monseigneur, je vous seray très obligé de ce que vous feres pour luy en cette occasion, et continueray à me dire pour toute ma vie Monseigneur,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
BRIENNE
A  SIBOURE   le 5 ème juin 1660
Mgr le Chancelier
 
(Lettre conservée à la Bibliothèque Nationale, Fonds Français 17397, F°255)
 
« Le dit sieur David Chaillou avait effectué divers voyages en Espagne et autres lieux où il s’était appliqué à la recherche  des secrets qui pouvaient être utiles au corps humain et avait découvert une certaine composition dite CHOCOLAT, dont l’usage était sain. Il désirait en faire part au public, s’il plaisait au Roi de lui accorder la permission d’en faire seul le débit.»
Arceaux de la rue  Port Neuf - Bayonne
rue Port Neuf - Bayonne
Saint-Esprit
De même, grâce à un testament de 1694, nous relevons la présence à Saint Esprit de Jean Duplaâ, faiseur de chocolat. Mariée depuis 1678, son épouse Jeanne Duguit déclare le 14/9/1694, en présence du juif Bartholomé Cardoze, qu’elle veut être enterrée dans l’église St Jean de Jérusalem du présent bourg et que les honneurs funèbres lui soient faits par son héritier Jean Duplaâ faiseur de chocolat.
 
Où Jacques de Barrère et Jean Duplaâ ont-ils acquis la technique de fabrication et se sont-ils approvisionné en cacao, si ce n’est auprès de quelques privilégiés de la communauté Juive de Saint Esprit. A cette époque là, Georges Cardoze, Mendes Dacosta et Alvaro Louis achètent le 13 octobre 1689 les terrains de la métairie de Matras sur les hauteurs de St Etienne, en prévision de l’inhumation de ceux de la Nation Portugaise arrivés à Bayonne vers 1620. Le cimetière précédent St Simon acheté en 1654, se révélant trop petit.
 
Ce sont là, à Bayonne, les quelques rares preuves écrites concernant le chocolat à la fin de la seconde moitié du XVII° siècle, un produit récent réservé aux chanoines de la collégiale de Saint Esprit et de la cathédrale de Bayonne, aux bourgeois aisés de la ville.
Monsieur de Vauban, ingénieur du Roi arrive à Bayonne en 1680, accompagné d’une importante suite d’officiers. Commissaire général des fortifications, il est chargé par le Roi de réorganiser la défense des villes frontières.
Comme pour tout personnage de qualité, le premier échevin lui remet le 2 mai seize livres de chocolate qui coûtera 72 livres à la Ville. Aucune précision dans le document sur l’origine de ce chocolat. Le 1er juillet le Trésorier de la ville fait état des dépenses de «  la somptueuse collation » offerte à Mr de Vauban, et à ses officiers pour un montant de 340 livres et 18 sols.
 
Les archives municipales de la fin du XVIIe siècle, ne nous livrant plus de documents sur le chocolat, la consultation systématique des registres paroissiaux, des minutes notariales de Bayonne, de Saint Esprit lès Bayonne et des villages environnants, nous mena vers d’autres découvertes.
 
Ainsi, en 1684, lors de l’inventaire des biens de feu André d’Alzaté 4ème vicomte d’Urtubie, le notaire découvre dans une méchante malle une écuelle, trois cuillers, deux fourchettes, le tout d’argent et une chocolatière de cuivre
Bailli d’épée du Labourd, il accompagna en 1659 à Madrid le maréchal de Gramont, négociateur du mariage du Roi avec l’Infante. Ramena-t-il cette chocolatière de son séjour en Espagne ? On peut le supposer.
 
La première mention écrite dans les registres paroissiaux, de l’existence d’un chocolatier concerne le bourg de Saint Esprit en 1687.
Jacques de Barrère faiseur de chicolatte habitant Saint Esprit fait baptiser le 9 mars 1687 à Anglet sa fille illégitime, née de ses relations avec Joanne de Lassalle.
Manifestement le curé découvre cette nouvelle activité.
1761 -
Statuts des corporations
«Par devant le notaire royal soussigné, ont comparut les sieurs marchands épiciers établis en la présente ville , lesquels nous ont requis, à telle fin que de raison de leur donner acte de ce qu’ils déclarent et attestent devant qui il appartiendra qu’il n’y a jamais eu en cette Ville aucune maîtrise des chocolatiers, qu’il a été loisible de tout temps à chacun, habitant ou étranger de le fabriquer et que de tout temps immémorial, ce sont les marchands portugais du bourg de Saint Esprit qui l’ont fabriqué, soit chez eux ou dans leurs magasins ou chez les comparants lorsqu’ils en eu besoin et qu’enfin ce n’est que depuis quelques temps que des espagnols se sont mêlés de faire du chocolat  concurremment avec les portugais du dit bourg sans aucun empêchement, de quoi les dits sieurs comparants m’ont requis et que je leur ai octroyé, Fait et passé à Bayonne l’an mille sept cent soixante deux le vingt trois novembre».
 
Signatures : Pierre Saubaigné, Salvat Saux, Etienne Potel, Charles Elissalde, Pierre Pouyols, Noël Castagnet, Jean Lafargue, Florent Dubertrand dit Ducanelle tous épiciers et Bernard Ferrandou marchand droguiste.
 
Encouragé par l’initiative de ce groupe d’épiciers, Moïse Mesquitte syndic des marchands juifs du bourg de St Esprit lès Bayonne, fait signer une requête par ses coreligionnaires :
 
Les sieurs échevins ayant établi une maîtrise de chocolatiers sur la requête de neuf particuliers presque tous étrangers, les statuts ont été homologués en cour du parlement de Bordeaux de sorte que les dits comparants  et tous autres, à l’exception des neuf particuliers, sont privés de gagner leur pain, quoique par des lettres patentes de SM, il soit permis à la nation portugaise du dit bourg de Saint Esprit de faire toute sorte de commerce, c’est pourquoi les dits comparants se sont déterminés à faire opposition à l’arrêt homologué des statuts à fin d’obtenir la suppression. Les dits comparants ont choisi leur procureur et syndic le sieur Moyse Mesquitte.
 
Le Parlement donnera satisfaction aux bourgeois bayonnais et annulera en 1767 les statuts homologués un peu hâtivement par les Echevins en 1761.
Rédigés et signés le 19 septembre 1761, les 35 articles des statuts sont homologués le 4 décembre par le maire François Dubrocq, le greffier Pierre de Lesseps et confirmés par la cour du parlement de Bordeaux l’année suivante
 
Tous les premiers dimanches de chaque mois, les maîtres chocolatiers seront tenus d’assister à la messe dite dans la chapelle St François du Couvent des Cordeliers, suivie de leur assemblée, sous peine d’amende.
Le vingt Janvier, jour de fête des saints Sébastien et Fabien, leurs patrons, ils assisteront à une messe chantée dans la dite chapelle.
 
Désormais, n’auraient l’autorisation de fabriquer du chocolat ou d’ouvrir boutique que ceux qui seraient reçus Maîtres dans la dite corporation.
Les personnes qui n’auront pas été reçues Maîtres, ne pourront aller chez les particuliers pour y composer du chocolat pour leur provision personnelle sous peine de confiscation de leurs outils et cent livres d’amende applicable la moitié à la ville et l’autre moitié à la corporation. ( article IX )
 
L’aspirant à la maîtrise, après trois ans d’apprentissage, devra faire un chef d’œuvre, apporter son certificat d’apprentissage, un certificat de bonnes vies et mœurs et une attestation de son appartenance à la religion catholique apostolique et romaine, dûment légalisée par le curé de sa paroisse. (article XVII)
 
Mais les épiciers et droguistes de Bayonne, qui ont tous des liens  de parenté proche ou lointaine, se sentent lésés dans leurs intérêts ne souhaitent pas voir leurs revenus amputés d’une ressource qui s’annonce des plus prometteuse. Aussi, leur réaction ne se fait pas attendre, dés le mois de novembre 1762, Pierre Saubaigné marchand épicier de la rue Douer, prend les choses en main au nom de ses confrères et fait enregistrer par le notaire royal le texte de leur protestation:
Port de Bayonne (source : Médiathèque de Bayonne)
Manière dont les habitants de la Nouvelle Espagne
préparaient le chocolat.
De l’introduction du chocolat dans les provinces basques au nord ou au sud de la Bidassoa est aussi obscure que dans le reste de la péninsule Ibérique.
 
L’histoire du chocolat en pays basque commence dans la seconde moitié du XVII° siècle et non en 1609. Rien dans les archives municipales, départementales, nationales ou de la communauté juive, ces dernières examinées avec minutie par Anne Brami ou Anne Zink, ne permet de supposer une activité chocolatière dans la première moitié du XVII° siècle.
 
On découvre pour la première fois le mot CHOCOLAT en 1670 à Bayonne dans les comptes du Trésorier de la Ville:
Pour Monsieur de Lafourcade, bourgeois et trésorier de la Ville de cette présente année 1670
 
"Monsieur, Il vous plaira rembourser des deniers de votre recette au sieur Coronneau un de nos jurats la somme de huitante deux livres cinq sols à lui due pour vingt cinq livres de checolatte qu’il a fait venir d’Espagne à notre prière pour bailler de présent à des personnes de considération, à laquelle somme s’est montée avec les frais. Et en rapportant les présents endossés de reçu la dite somme vous sera allouée à la reddition de vos comptes."
A Baionne le vingt huit avril 1670
On ignore quels furent les personnages ayant reçu ce Checolatte en cadeau.
 
Sous l’ancien  régime, il est de bon ton d’offrir des présents aux  grands personnages dont on veut s’attirer les grâces. En 1518, l’épouse de Mr d’Esgoarrabaque, gouverneur de Bayonne reçoit un baril de langues de baleine et douze crabes. L’ambassadeur d’Angleterre se voit remettre lors de son passage, un faisan sauvage et deux perdrix bien grasses. Le duc de Mayenne ambassadeur de France en Espagne reçoit en 1619 un cheval d’une valeur de 1500 livres acheté en Espagne par Arnaud de Perrusquy, marchand d’Espelette. Le duc passa une seconde fois  comme gouverneur de la Guyenne.
 
On peut s’interroger sur cette dépense de l’année 1670 de 82 livres et 5 sols destinés à l’achat de chocolat. Connaissant l’engouement des grands seigneurs pour ce nouveau produit, le jurat Couronneau l’avait-il fait venir d’Espagne, jugeant peut être que celui de Saint Esprit n’était pas d’assez bonne qualité ? Ou contrairement à la légende orale, n’y avait il pas encore de fabricants dans la ville ?
I
Pour implorer l’assistance divine Il sera célébré une messe basse tous les premiers dimanches de chaque mois devant la chapelle de Saint François des R.P.Cordeliers de cette ville, auxquelles messes qui se diront, savoir depuis Pâques jusqu’à Saint Michel à sept heures du matin et depuis la Saint Michel jusqu’à Pâques à huit heures, tous les maîtres seront tenus d’assister ainsi qu’à l’assemblée d’après la dite messe à moins d’absence ou maladie qu’ils seront tenus de faire savoir au patron ou clavier, à peine de cinq sols pour avoir manqué à la messe et de cinq autres pour ce qui regarde de la dite assemblée applicables à la boite de la compagnie.
II
Que les jours des Saints Fabien et Sébastien vingtième janvier qu’ils choisissent pour leur patron, il sera célébré vers les neuf heures du matin devant la dite chapelle Saint François une messe chantée à laquelle tous les maîtres seront tenus d’assister et se trouveront pour cet effet devant la maison du patron avant la dite heure a fin de se rendre ensemble à l’église, à peine de payer seize sols contre chaque défaillant applicables à la dite boite.
III
Il sera établi sans le corps ou communauté des maîtres chocolatiers un syndic, un patron et un clavier.
IV
Le Patron accompagné du syndic sera tenu chaque année à tel jour qu’il jugera à propos de choisir de faire la visite chez les différents maîtres pour y examiner la composition du chocolat et la qualité des drogues qui doivent être employées et pour voir s’ils ne s’y commettent d’abus par rapport aux apprentis qu’autrement il sera payé par chaque maître ou veuve vingt sols pour le droit de visite.
IX
Aucunes personnes qui n’auront pas été reçues maîtres et agrées dans la communauté ne pourront tenir boutique ni ouvroir pour y faire du chocolat non plus qu’en faire secrètement chez eux en aucun lieu de la ville ou juridiction à peine de cent livres d’amende même de plus grandes peines s’il échoit en cas de récidive, laquelle amende sera appliquée moitié à la ville et moitié à la communauté, pourront néanmoins les autres habitants de la dite ville vendre et débiter du chocolat où bon leur semble pourvu qu’ils ait été fait par des maître chocolatiers ou par un compagnon qui sera à son service.
 
Parmi ces 35 articles, il faut retenir l’article XVII :
L’aspirant à la maîtrise, après trois ans d’apprentissage, devra faire un chef d’œuvre, apporter son certificat d’apprentissage, un certificat de bonne vie et mœurs et une attestation de son appartenance à la religion catholique apostolique et romaine dûment légalisée par le curé de sa paroisse.
 
Ne sont donc pas admissibles, ceux de la religion réformée (rares, mais pouvant venir du Béarn) et ceux de la nation Portugaise, les Juifs du bourg de Saint Esprit lès Bayonne (assez nombreux)
Il est également prévu que la Caisse de la Communauté devra verser à un maître en état d’indigence ou d’infirmité l’empêchant d’exercer son métier, une somme de dix livres par mois. En cas d’insuffisance dans la caisse, une quête sera faite chez tous les maîtres.